The Meters

The Meters : Pionniers du Funk et Légendes de la Nouvelle-Orléans

The Meters, originaires de La Nouvelle-Orléans, sont souvent considérés comme les pionniers du funk, un genre musical qui a influencé d’innombrables artistes et redéfini les frontières de la musique populaire. Fondé en 1965, le groupe est formé par des musiciens exceptionnels, notamment Art Neville (claviers et chant), Leo Nocentelli (guitare), George Porter Jr. (basse) et Joseph “Zigaboo” Modeliste (batterie). Leur son unique, une fusion de rhythm and blues, de soul et de jazz, a été marqué par des grooves puissants et une approche instrumentale à la fois minimaliste et sophistiquée.

Les débuts et l’évolution musicale

Dès ses débuts, The Meters se sont imposés comme un groupe de musiciens de studio recherchés. Ils ont collaboré avec des artistes légendaires tels que Allen Toussaint, producteur influent et figure majeure de la musique de La Nouvelle-Orléans. C’est dans ce contexte qu’ils ont peaufiné leur son distinctif : une rythmique électrique, des riffs de guitare saccadés et des lignes de basse complexes mais irrésistiblement dansantes.

Leur premier album, éponyme, sorti en 1969, contient des morceaux qui sont devenus des classiques instantanés, notamment “Cissy Strut” et “Sophisticated Cissy”. Ces titres ont posé les bases de leur approche musicale : un funk pur, brut, sans artifices, souvent instrumental, qui mettait en avant le talent de chaque membre.

“Cissy Strut”, avec son groove entêtant et son mélange de subtilités rythmiques, est rapidement devenu un hymne du funk et a introduit The Meters à un public plus large. Leur style distinctif repose sur la précision et la synchronicité des musiciens. Art Neville, avec ses claviers chaleureux, était la colonne vertébrale harmonique, tandis que Zigaboo Modeliste offrait des motifs de batterie complexes et dynamiques qui, à eux seuls, pouvaient porter un morceau. Leo Nocentelli, par sa guitare incisive, ajoutait une texture unique, et George Porter Jr. était reconnu pour sa capacité à gérer la ligne de basse avec une fluidité impressionnante.

Influence et collaboration

L’influence de The Meters s’est rapidement propagée bien au-delà de La Nouvelle-Orléans. Ils ont accompagné des artistes tels que Dr. John, Paul McCartney et The Rolling Stones. Ces collaborations leur ont permis de faire connaître leur musique à l’échelle internationale. En 1975, le groupe a rejoint les Rolling Stones lors de leur tournée nord-américaine, ce qui leur a permis de jouer devant des foules immenses et de conquérir un public rock.

Bien que le groupe ait souvent été sous-estimé par rapport à ses contemporains, son influence est indéniable. De nombreux artistes et groupes des décennies suivantes, tels que Parliament-Funkadelic, Prince et même des producteurs modernes comme Dr. Dre, ont reconnu la contribution des Meters à la construction du funk et du hip-hop.

Succès critique et reconnaissance tardive

Les albums suivants, tels que “Look-Ka Py Py” (1970) et “Struttin’” (1970), ont consolidé la réputation des Meters comme des maîtres du groove. Ces albums ont élargi leur palet musical tout en gardant leur essence funk intacte. Les critiques de l’époque ont salué leur capacité à créer des compositions électrisantes, avec des arrangements simples mais étonnamment sophistiqués.

Dans les années 1970, l’essor de la musique disco et l’évolution des goûts musicaux ont posé des défis au groupe. Cependant, The Meters ont su s’adapter et ont continué à innover. Leur musique a gagné en complexité, incorporant davantage d’éléments de funk psychédélique et de rock, comme en témoigne l’album “Rejuvenation” (1974). Cet album, souvent considéré comme leur chef-d’œuvre, inclut des morceaux emblématiques tels que “Hey Pocky A-Way” et “It Ain’t No Use”.

Malgré leurs succès critiques, les Meters n’ont jamais réellement atteint la reconnaissance commerciale à la hauteur de leur talent. Néanmoins, leur statut de légende s’est solidifié au fil des années, grâce à la redécouverte de leur musique par de nouvelles générations de musiciens et d’amateurs de funk. Leur influence a été ravivée par l’utilisation extensive de leurs morceaux dans les samples du hip-hop des années 1990 et au-delà.

L’apport unique de chaque membre

L’énergie des Meters repose sur la synergie entre ses membres, chacun apportant une touche spécifique au son global. Art Neville, surnommé “Poppa Funk”, était la voix et le cerveau du groupe. Son jeu de claviers, ancré dans la tradition de La Nouvelle-Orléans, était unique par sa capacité à allier une touche festive et une profondeur sincère.

Leo Nocentelli, guitariste virtuose, combinait riffs funk, blues et rock pour créer des lignes de guitare innovantes. Sa maîtrise technique et sa créativité ont été saluées par des guitaristes de renom, influençant des légendes comme Jimmy Page et Eric Clapton.

George Porter Jr., avec sa basse fluide et mélodique, a redéfini le rôle de la basse dans la musique funk. Son style unique a posé les bases de nombreux grooves modernes et a influencé des bassistes de divers horizons musicaux.

Enfin, Zigaboo Modeliste, considéré par beaucoup comme l’un des plus grands batteurs de funk de tous les temps, était l’âme rythmique des Meters. Son jeu était un mélange complexe de syncopes, de breaks et de motifs imprévisibles qui conféraient une énergie unique à chaque morceau.

La dissolution et l’héritage

Malgré leur immense talent, des tensions internes et des difficultés financières ont conduit à la dissolution des Meters à la fin des années 1970. Toutefois, leur héritage n’a cessé de croître au fil des décennies. Leurs enregistrements ont été redécouverts par de nouvelles générations, souvent grâce à leur présence dans des compilations et des samples utilisés dans la musique hip-hop et électronique.

Dans les années 1980 et 1990, l’intérêt pour le funk a ressurgi, et The Meters ont été reconnus comme des pionniers, contribuant à inspirer une multitude de groupes et d’artistes. Leur influence s’est faite sentir non seulement dans le monde du funk et du R&B, mais aussi dans le rock, le hip-hop et même la musique électronique. Des festivals et des concerts hommages leur ont été dédiés, et des musiciens contemporains ont souvent cité leur travail comme une référence incontournable.

Certains membres du groupe, tels que Art Neville et George Porter Jr., ont poursuivi des carrières musicales prolifiques, collaborant avec d’autres artistes et jouant dans des projets dérivés comme The Funky Meters, qui ont continué à propager l’esprit de la formation originale.

En définitive, The Meters restent une pierre angulaire du funk et de la musique de La Nouvelle-Orléans. Leur capacité à créer des grooves intemporels et à repousser les limites du genre a laissé une empreinte indélébile sur la musique contemporaine. Pour ceux qui cherchent à comprendre l’essence du funk et l’évolution de la musique populaire, l’héritage des Meters est tout simplement incontournable.