J.S. Ondara, un artiste kényan qui a capturé le cœur de l’Amérique avec son premier album « Tales of America », offre un regard introspectif sur le rêve américain à travers une lentille à la fois fraîche et nuancée. Sorti en 2019, cet opus est un mélange raffiné de folk et de narration qui puise dans la richesse des expériences personnelles d’Ondara, ainsi que dans son admiration et sa critique du pays qu’il a adopté comme foyer.
Né et élevé à Nairobi, au Kenya, Ondara a grandi en écoutant des artistes comme Bob Dylan et Neil Young, qui allaient profondément influencer son approche musicale. Cependant, c’est son expérience en tant qu’immigrant aux États-Unis qui fournit la toile de fond de « Tales of America ». L’album est une contemplation poétique de ce que signifie poursuivre le rêve américain dans un monde où ce rêve est de plus en plus évasif et complexe.
La première chanson de l’album, « American Dream », met en scène le ton avec une mélodie poignante et des paroles qui évoquent l’ambivalence. Ondara chante avec une voix douce et émotionnellement chargée qui semble s’élever directement du cœur de l’Amérique. La guitare acoustique, à la fois simple et élégante, est le véhicule parfait pour ses réflexions, nous transportant dans un voyage à travers les prairies de l’espérance et les vallées du désenchantement.
Tout au long de « Tales of America », on découvre des récits personnels qui résonnent universellement. Dans « God Bless America », Ondara utilise l’ironie pour examiner les contradictions de la société américaine, tandis que « Turkish Bandana » révèle l’histoire d’un amour perdu, métaphore possible de la quête et parfois de la perte d’identité dans un nouveau monde.
Les thèmes de l’aliénation et de la recherche d’appartenance sont récurrents. « Saying Goodbye » et « Give Me a Moment » sont des ballades émouvantes qui expriment la douleur et la nostalgie, mais aussi un espoir tenace. La sincérité de sa voix, parfois presque un murmure, crée une intimité presque déconcertante avec l’auditeur, comme si Ondara était dans la pièce, partageant ses histoires les plus personnelles.
Ce qui est remarquable avec « Tales of America », c’est la manière dont Ondara parvient à équilibrer des mélodies accrocheuses avec une profondeur lyrique. La musique n’est jamais surchargée; chaque note et chaque mot semblent intentionnels et nécessaires. « Leopard Tree Dream » en est un parfait exemple, un morceau qui capture l’essence de l’émerveillement et de la mélancolie.
L’arrangement de « Master O’Connor » montre la subtilité avec laquelle Ondara intègre des éléments de blues et de country dans sa musique folk, donnant une couleur particulière à ses récits. La chanson est un clin d’œil aux musiciens qui ont façonné sa compréhension de la musique américaine, une sorte d’hommage aux racines du genre.
Un autre aspect captivant de l’album est son authenticité. Ondara n’essaie pas de se conformer à un son ou un style spécifiquement américain; il apporte sa propre perspective, enrichie par son héritage kényan et ses expériences personnelles. Cette authenticité transparaît dans « Days of Insanity », où il aborde le climat politique et social avec une lucidité déconcertante.
La chanson « Torch Song » démontre la capacité d’Ondara à créer des hymnes folk qui sont à la fois intemporels et immédiatement contemporains. Avec son refrain entraînant et sa mélodie captivante, elle est peut-être l’un des morceaux les plus accrocheurs de l’album, et pourtant, elle ne sacrifie jamais la profondeur pour la mélodie.
Le talent de conteur d’Ondara brille tout au long de l’album, mais jamais plus que dans « Good Question », une piste qui illustre sa capacité à poser des questions plutôt qu’à prétendre avoir toutes les réponses. Il y a une humilité dans sa musique qui invite à la réflexion plutôt qu’à la proclamation, ce qui est rafraîchissant dans le paysage musical actuel.
La production de « Tales of America » est une autre clé de son succès. Elle est intime, mettant en avant la voix et la guitare, mais elle est aussi riche et nuancée. Des cordes occasionnelles et des touches subtiles de piano ajoutent de la profondeur sans jamais submerger la simplicité du son de Ondara.
L’album se termine avec « Saying Goodbye », une conclusion appropriée à ce voyage à travers le rêve et la réalité de l’Amérique. C’est un adieu doux-amer, qui laisse l’auditeur à la fois satisfait et désireux de plus.
« Tales of America » est bien plus qu’un simple album de musique folk. C’est un documentaire sonore, un carnet de voyage d’un étranger qui regarde l’Amérique avec les yeux grands ouverts. Avec une poésie qui dérive entre l’admiration et la critique, J.S. Ondara nous livre un récit musical qui ne se contente pas de raconter des histoires, mais qui les ressent profondément. La voix d’Ondara, ses mélodies et ses mots restent avec nous, longtemps après que les dernières notes de l’album se sont évanouies, rappelant que les histoires de l’Amérique ne sont pas écrites seulement par ceux qui y sont nés, mais aussi par ceux qui y rêvent.